Le téléchargement et vous...

Publié le par Simon

La guerre contre le téléchargement illégal de musique et de films fait rage, les maisons de disques et les syndicats d'éditeurs sont bien décidés à donner un grand coup d'arrêt à ce phénomène. Les cibles sont les réseaux de Peer-to-Peer mais aussi les sites tels que radio-blog. En même temps se développe un marché du téléchargement légal et gratuit, avec des plateformes telles que Jamendo ou Deezer,  mais l'offre de titres est encore insignifiante.

Le fait de vouloir combattre le téléchargement illégal est certes tout à fait légitime. Pourtant en tant que consomateur, le principe de la musique gratuite ne me choque pas. Premièrement, je crois qu'un artiste ne devrait pas vouloir vivre de sa passion; je crois que le fait de mélanger art et business ne profite qu'au second. Je formule cet avis en tant que musicien moi-même, mais ça reste une opinion très discutable et personnelle, et des tas d'artistes ne sont pas d'accord avec ça : demandez à Thurson Moore par exemple. Deuxièmement, le téléchargement a eût un effet bénéfique en libérant le pouvoir d'achat des auditeurs. L'argent qui n'est pas dépensé dans les CDs l'est pour les concerts. Les salles n'ont jamais été aussi pleines, les réunions d'anciens se multiplient, à l'image du gigantesque buzz autour du concert de Led Zep à Londres. Or les groupes gagnent beaucoup mieux leur vie grâce aux concerts qu'aux ventes d'album. Donc le téléchargement a fait perdre de l'argent aux maisons de disque mais pas aux artistes. Et vu comment les maisons de disque ont géré l'industrie depuis, disons, l'invention du CD, je n'ai pas envie de les plaindre. Certes il reste le problème des emplois créés par la vente de disque, en particulier les professionels de l'enregistrement, des gens indispensables à la musique qui subissent les effets des baisses des ventes.

En tant qu'amateur de musique, oui le téléchargement me choque. Parce qu'il désacralise la musique. Un album est un objet qui se convoite, se mérite et s'apprivoise. Au lieu de ça, le téléchargement nous propose d'obtenir en trois clics juste cette chanson que vous adorez, ou au contraire une discographie entière d'un artiste, que vous n'écouterez jamais en totalité. Adieu les pochettes colorées aussi mythiques que les albums qu'elles contiennent, bonjour les images jpeg minuscules. Et pour couronner le tout, on écoute la musique ainsi obtenue sur des enceintes de mauvaise qualité, en zappant à tout va, sans jamais écouter une chanson jusqu'au bout et encore moins un album; ça se passait autrement avec les 33 tours! Et là, je mets dans le même sac le téléchargement légal et illégal : c'est pas demain qu'on me verra dépenser 99 centimes sur iStore!

Le gros avantage du téléchargement c'est de pouvoir trouver des albums rares et plus édités. J'ai beau être très fan de Josh Homme, mon budget m'empêche d'aquérir les vinyls des premières Desert Sessions et de la démo "Sons Of Kyuss" qui se vend pour 200 à 500$ sur eBay. Remarquez que vous ne trouverez pas ces titres en ventes sur iStore non plus.

Tout ceci posé, je suis plutôt contre le téléchargement P2P même si ce n'est pas pour les même raisons que tout le monde. En revanche, je suis tout à fait opposé aux moyens utilisés dans la lutte contre le P2P. Une des dernières modes est d'attaquer les éditeurs de logiciels de P2P comme LimeWire, via la loi DADVSI. La procédure a peu de chances d'aboutir sachant que les sociétés éditrices desdits logiciels sont toutes étrangères. Mais quand même on peut dire qu'on touche à du grand n'importe quoi! Condamner le fabricant d'un logiciel dont l'usage est potentiellement illégal, mais dont le principe n'est pas illégal. Dans ce cas à peu près n'importe quel logiciel peut être utilisé à des fins illégales, avec un peu d'imagination. Pour prendre une métaphore un peu bancale, considérons un fabricant d'armes; les armes servent à tuer, ce qui est souvent un acte illégal, et en tous cas toujours plus grave que le téléchargement du dernier single de 50 Cent. Donc les fabricants d'armes commercialisent des objets dont l'usage est potentiellement illégal. Pourquoi personne ne va toquer à la porte de monsieur Dassault pour lui faire part de ce raisonnement que l'on tient aux éditeurs de LimeWire, Shareaza, Azureus et Morpheus? De plus le principe même des logiciels de P2P est en lui-même assez génial et pourrait changer le fonctionnement d'internet à moyen terme, en permettant à chacun d'être un serveur... mais ça la SPPF s'en contrefout.

Publié dans Billets d'humeur

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T
Tout le problème vient de fait que l'industrie musicale n'a pas pris le téléchargement au sérieux en temps voulu...et maintenant elle se raccroche aux branches quand il est entré dans les moeurs, c'est un peu grotesque (parfois il faut savoir écouter les Cassandre).Maintenant...il y a aussi une évidente hypocrisie dans cette guerre crétine : quand on regarde attentivement les statistiques, le marché du disque ne s'effrite pas tant que ça, quant au marché du dvd il ne s'est jamais aussi bien porté. Donc bon...
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S
Je pense que l'industrie a pris le P2P comme un problème dès le début, dès Napster. Cependant ils ont toujours essayé de condamner cette pratique plutôt que d'y apporter une réponse pour faire concurrence... Même aujourd'hui l'offre de téléchargement légal fait un peu pitié.Le DVD en revanche, apparu à peu près en même temps que le P2P, est la preuve qu'on peut vendre quelque chose de différent que ce qui circule gratuitement. C'est cette plus-value (bonus, qualité de l'image, rééditions de films rares...) qui permet au DVD d'affronter la concurrence gratuite beaucoup mieux que ne le fait la musique.